19 octobre 2021 | Thomas Lavater

Formats de vente au détail concluants : un avenir sans places de parking ?

Dans beaucoup de villes, de nouveaux concepts de mobilité sont envisagés, examinés ou testés. Tous ces concepts poursuivent le même objectif : bannir le trafic motorisé des centres-villes et faire plus de place au trafic lent et aux espaces libres. Ces concepts porteront-ils un coup fatal aux magasins des centres-villes d’ores et déjà malmenés ? Analyse.

Pour exploiter avec succès un format de vente au détail, il faut une clientèle régulière, un bon taux de fréquentation et un grand attrait de l’environnement commercial du point de vue de la qualité du séjour et de l’offre environnante. Le fait que la clientèle se déplace en voiture, en scooter électrique ou déambule dans les rues marchandes n’a aucune importance. En revanche, les préférences personnelles des acheteurs au sujet de la manière dont ils se rendent au magasin sont déterminantes. Tandis que certains préfèrent aller faire leurs achats à vélo ou avec un chariot à provisions, il est important pour d’autres de ranger rapidement leurs emplettes dans le coffre de la voiture, en toute commodité, pour enchaîner ensuite avec une autre aventure de consommation. À ce niveau, il est fondamental de ne pas toucher à la liberté de choix du consommateur.

Admettons que la zone située entre la gare centrale de Zurich et la baie du lac, du Bellevue au Central et de la Langstrasse à la gare de Zurich Enge soit interdite à la circulation, et donc uniquement autorisée au trafic lent, sauf pour les livreurs des magasins et les taxis électriques. Cette zone circonscrite a une superficie de 1,6 kilomètre carré. Les surfaces libres des rues pourraient être utilisées pour des parcs, des zones de déchargement pour le trafic lent et pour les transports publics. À cet endroit idyllique, une nouvelle oasis de bien-être serait créée pour les personnes ayant envie de marquer une pause, d’échapper un peu au quotidien tellement stressant et d’avoir un comportement respectueux de l’environnement. Mais qu’en serait-il des automobilistes ?

Il s’agit ici de créer des conditions idéales pour que l’expérience d’achat reste attrayante. Plusieurs villes de Suisse ont déjà élaboré divers concepts de mobilité qui analysent les situations existantes du point de vue des achats et qui montrent des solutions possibles pour réduire le trafic en centre-ville. La ville de Zurich a par exemple publié fin 2017 son étude sur mesure pour la branche du commerce de détail «Handel im Wandel», dans laquelle sont présentés différents scénarios d’avenir. Mais cela ne va pas encore assez loin. Et si nous parlions donc de possibilités de parking abondantes et bon marché à la périphérie de ces zones interdites à la circulation ? Pour chaque magasin, il deviendrait alors obligatoire d’assurer un service de livraison (gratuit) à domicile ou jusqu’à ces parkings. Le trafic motorisé doit être piloté de façon intelligente avec de nouvelles possibilités autour de la zone, par exemple au moyen d’un boulevard circulaire, d’un tunnel sous le lac ou de projets de construction similaires pour organiser le trafic de façon durable. L’accès à la zone interdite à la circulation doit proposer des options très variées. Des offres adaptées à chaque besoin doivent voir le jour, de façon à pouvoir accéder individuellement aux différents lieux. L’objectif doit être de ne pas avoir besoin de sa voiture, mais de pouvoir rejoindre la zone interdite à la circulation en éprouvant un certain plaisir.

La nouvelle expérience globale ainsi créée lors de la visite du centre-ville augmentera la fréquentation : Les gens flâneront de plus en plus dans les espaces accessibles au public, s’attarderont dans les cafés, feront leurs achats dans les magasins et s’amuseront sur les places de jeux. Par conséquent, les visites des clients seraient assurées et le chiffre d’affaires des magasins de vente au détail serait maintenu au même niveau, mais sans accès direct du trafic motorisé. Des exemples provenant des Pays-Bas montrent que de tels concepts de mobilité sont concluants. Là-bas, la ville de Groningen a été divisée en quatre secteurs à la fin des années 70 et le trafic motorisé entre ceux-ci a été fortement limité. À Houten aussi, une commune comptant actuellement 50 000 habitants et située à proximité d’Utrecht, un concept entièrement interdit à la circulation a été esquissé sur la planche à dessin puis mis en œuvre dans les années 70. Les voitures circulent exclusivement sur un boulevard circulaire entourant la ville.

Selon moi, un nouveau concept de mobilité pour une ville suisse nécessite néanmoins que les différentes mesures soient mises en œuvre simultanément et que les horaires des magasins du centre-ville restent ouverts pendant le réaménagement. Pour que cela fonctionne, des solutions doivent être trouvées et mises en œuvre pour les flux de transport, la logistique à petite échelle, le stationnement et les options d’accès. Il appartient aux autorités, aux communes et aux urbanistes de se montrer à la hauteur de cette tâche exigeante, qui nécessite d’être élaborée, planifiée et financée avec soin avec l’aide de professionnels triés sur le volet. Si la Suisse commence aujourd’hui à appliquer un tel concept pour ses centres-villes, les prochaines générations pourront en profiter. Enfin et surtout, les métropoles innovantes suscitent aussi la curiosité des touristes. En Suisse, c’est Zurich qui présente les meilleures conditions pour s’illustrer en tant que pionnière dans ce domaine.

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